Se séparer d'un conjoint violent :
comment se protéger et protéger ses enfants ?

On l’ignore trop souvent, mais le moment le plus dangereux d’une relation violente reste celui de la séparation et du départ du domicile conjugal de la femme victime.

En effet, le conjoint violent sent qu’il va vous perdre et n’acceptera pas cette séparation. Il va alors vous suivre, vous harceler par message, par mails, s’en prendre physiquement à vous… Parfois même, le seul moyen pour lui de garder le contrôle sur vous, va être de mettre fin à votre vie.

Il est donc plus que nécessaire que la sortie de la relation se fasse de la manière la plus sécurisée possible, particulièrement si vous avez des enfants communs avec votre partenaire.

En effet, vos enfants sont malheureusement les victimes collatérales de ces situations et il vous appartient de les protéger.

Au demeurant, le meilleur conseil que je puisse vous donner reste celui de vous faire assister d’un avocat particulièrement familiarisé aux violences conjugales, car une procédure mal faite peut se retourner contre vous par la suite…

La question est dès lors de savoir comment vous protéger, vous et vos enfants lors de la séparation ?

Nous vous proposons ici quelques pistes :

  • La main-courante : Si la situation est telle que vous devez fuir le domicile conjugal avec vos enfants, la première des choses à faire est de le signaler aux forces de l’ordre, afin que cela ne vous soit pas reproché par la suite. Il s’agit de déposer une main-courante dans un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie. Cela permettra à ce stade de garder une preuve de la date et des raisons de votre départ.
  • La plainte : Si vous subissez des violences de la part de votre partenaire, le premier réflexe à avoir est celui d’aller déposer plainte et de faire constater vos blessures, ou votre état psychologique. Cette plainte va constituer le premier élément de preuve de votre procédure, notamment si le procureur de la République décide d’y donner une suite pénale. Elle doit donc être bien prise ; les faits devant y être détaillés. Les agents de police ou les gendarmes ont l’obligation de prendre votre plainte. Si on vous la refuse, que vous ne vous sentez pas écoutée ou en confiance, changez d’endroit.
  • L’ordonnance de protection : C’est le moyen le plus rapide pour obtenir votre mise en protection de la justice. A partir du moment où la requête en ordonnance de protection est déposée au tribunal, une décision de justice devra être rendue en 6 jours maximum. Pour pouvoir obtenir cette ordonnance, il vous appartiendra de démontrer la réunion de deux éléments : l’urgence et la vraisemblance des violences. Dans ce cadre, vous allez pouvoir demander au Juge aux affaires familiales, de nombreuses mesures, pour une durée provisoire de 6 mois maximum :
  • interdiction de contact (avec vous et vos enfants, d’autres membres de la famille, votre nouveau partenaire…),
  • interdiction de paraître dans certains lieux (votre domicile, votre lieu de travail….),
  • interdiction de port d’armes,
  • proposition d’une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes,
  • demande de jouissance du domicile conjugal,
  • demande de dissimulation de votre nouveau domicile,
  • demande d’autorité parentale exclusive sur les enfants communs

En cas de non-respect des obligations qui seront fixées par le juge, votre conjoint        encourera alors deux ans d’emprisonnement et 15.000 euros d’amende (art. 227-4-2              du Code civil).

  • La saisine du Juge aux affaires familiales en urgence pour divorce (JAF) : Si les liens du mariage vous unissent à votre partenaire, il est tout à fait possible de présenter au JAF une demande de divorce en urgence, tendant à assigner votre conjoint en justice. Cette demande d’assigner à « bref délai » devra être justifiée par la situation d’urgence vécue. Elle permettra de rendre plus rapide la procédure de divorce. Comme toute demande, elle pourra vous être refusée si le juge estime qu’il n’y a pas d’urgence à la situation. Une date d’audience plus lointaine vous sera alors fixée.
  • La saisine du Juge aux affaires familiales si vous n’êtes pas mariés, mais que vous avez des enfants : Si vous ne souhaitez pas demander une ordonnance de protection, ou que celle-ci vous est refusée, une saisine du JAF sera possible dans le cas où vous avez des enfants communs avec votre partenaire. Vous pourrez formuler des demandes justifiées par la situation de violence :
  • jouissance provisoire du domicile familial (Monsieur devra quitter le domicile, si besoin avec le concours de la force publique),
  • autorité parentale exclusive sur vos enfants,
  • résidence habituelle de vos enfants à votre domicile,
  • droit de visite médiatisée en lieu neutre, ou même droits réservés.
  • Le téléphone grand danger : Ce téléphone particulier est un dispositif de protection qui permet à la victime de solliciter rapidement l’intervention des forces de l’ordre, grâce à un bouton d’urgence et un service de téléassistance accessible 7J/7, 24H/24. Elle pourra activer le système en cas de danger avec l’auteur.
  • Le bracelet anti-rapprochement : Ce bracelet permet à la fois la géolocalisation de l’auteur violent et celle de sa victime. Le système d’alerte se déclenche alors automatiquement quand l’auteur va trop s’approcher de la personne protégée dans le périmètre interdit par le juge (entre 1km et 10km). Si la personne ne répond pas à la plate-forme de téléassistance ou ne rebrousse pas chemin, les forces de l’ordre seront alertées. La mesure est ordonnée pour une durée de 6 mois et ne pourra pas dépasser 2 ans.